Les "75"

Une petite explication du titre abscons et racoleur s’impose. Ne vous méprenez pas, il ne s’agit pas des parisiens ! On appelle les 75 à Madagascar les couples mixtes franco-malgaches. Il a 55 ans, elle en a 20. Parfois, lui 60, elle 15. D’ailleurs compte tenu de l’augmentation des seniors français esseulés et de l’allongement de la durée de vie, on glisse de plus en plus vers la Vendée, à savoir les « 85 ». Il a 60 ans ou plus, elle a 25 ans ou moins. Quant au mot pute, soyons clair, ce n’est ni agressif ni péjoratif. Au contraire, chez moi, c’est un terme affectueux, que je préfère à prostituée, péripatéticienne ou salope. Une précision, une pute est quelqu’un qu’on paie et qui couche avec tout le monde. Une salope, c’est une fille qu’on ne paie pas, mais qui couche avec tout le monde, sauf avec toi !
Donc ces seniors viennent à Madagascar pour trouver l’âme sœur, qu’ils n’ont pas ou ne peuvent plus trouver en France pour diverses raisons. Et curieusement, ils se retrouvent quasiment toujours avec des jeunes femmes de 18 à 25 ans en moyenne. Pourquoi pas avec des femmes plus mûres de 35-45 ans ?
Mystère, parce qu’ils préfèrent la chair fraîche me dites-vous ? Possible. Il est sûr que si un homme bien mûr regarde affectueusement une jeune femme de 25 ans en France, même sans arrières pensées, au mieux elle le prend pour un vieux dégueulasse, au pire elle appelle les flics ! Alors que d’un point de vue esthétique, c’est un compliment. D’un point de vulve, c’est autre chose.
En effet la misère ambiante à Madagascar fait que ces demoiselles sont prêtes à tout pour « gagner » un vazaha comme on dit ici. Très souvent, la famille les y encourage, d’une part pour « sauver » la petite, d’autre part pour caser une bouche à nourrir de moins, enfin dans l’espoir de bénéficier des retombées pécuniaires venant de cette union. Pourquoi donc des « vieux ». D’abord, les jeunes vazahas venant à Madagascar sont souvent un peu chien fou et ont tendance à courir le jupon, elles s’en méfient.
Ensuite, elles se disent qu’un senior sera plus sage, et qu’à priori, il est arrivé dans la vie et dispose donc d’une assise financière certaine. D’aucuns prétendent qu’au travers de ces hommes matures, les donzelles retrouvent en même temps l’image du père qui très très souvent a vite disparu du domicile familial.
Et généralement les anciens sont plus attentionnés, moins violent et plus fidèles que les jeunots. Ces vahiny ne sont pas tous des broquignols et désirent sincèrement une compagne aimante et douce, si possible plus ou moins soumise.
Et c’est là que le bât blesse. Le spectacle de ces vieux messieurs au bras d'une quasi adolescente est toujours choquant. Que ce soit dans la rue ou au restaurant, c’est toujours pitoyable de voir ces beautés juvéniles suivrent leur amant ou faire tapisserie avec leur Don Juan d’un autre âge.
Comment ces hommes âgés peuvent-ils sincèrement croire qu’elles les aiment pour ce qu’ils sont ? Certains sont conscients de l’incongruité de la chose et s’en accommodent. Un moment de honte est vite passé. Ils se foutent du regard des autres ici ou en Gaule. La plupart du temps, ces filles sont d’un milieu défavorisé, ont très peu été à l’école. Elles ont les conversations qu’elles peuvent, celles de jeunes d’une vingtaine d’années qui sont à des lampadaires de celles de leurs conjoints.
Il est pathétique d’observer ces couples à table où règne un silence parlant. La pauvre fille ne sait pas quoi dire, ne comprend rien quand il parle de tout et de rien, elle essaie de capter un sens à la discussion avec le regard inspiré d’une huître en train de perler !

Les "75" suite et fin .


Graines de bitume, enfants de la rue, Tana

Mokana, orphelinat à Fianarantsoa